Une technique de vernalisation.

Introduction.

Germination et dormance.

Pour germer les graines ont besoin principalement d'humidité et de chaleur. Ces conditions nécessaires ne suffisent cependant pas toujours, quand on sème un noyau de cerise ou de pêche qu'on vient de manger, on ne voit rien sortir de terre.. Et c'est heureux ! dans la nature le petit pêcher serait trop tendre à l'arrivée de l'hiver et le moindre gel lui serait fatal.

La graine avant de germer doit subir un certain nombre d'intempéries et d'actions physico-chimiques pour pouvoir germer au retour des beaux jours. Cette faculté d'attendre des conditions propices au développement de la plante est appelé dormance. Les conditions que doivent subir les graines pour lever cette dormance varient d'une espèce à l'autre et correspondent aux conditions auxquelles les graines sont exposées dans leur habitat naturel.

Vernalisation.

Nous parlerons ici des traitements qui peuvent être appliqués à des graines d'arbres et arbustes de régions tempérées caractérisées par des hivers plus ou moins froids. Un des facteurs importants de ces traitements est la soumission au froid, la vernalisation est constituée de ces traitements (notons que le terme "vernalisation" peut aussi se référer à l'exposition de plantes au froid, traitement qui peut être nécessaire pour leur floraison).
Le froid à lui seul n'est très généralement pas suffisant pour lever la dormance, les graines doivent être placées dans des conditions d'humidité satisfaisantes, certains traitements supplémentaires peuvent aussi être nécessaires, par exemples certaines graines doivent passer dans le tube digestif des oiseaux qui les disséminent pour pouvoir germer.

Une solution consiste à semer les graines avant l'hiver et attendre leur levée au printemps, cela marche souvent, mon voisin a quelques pêchers dans son jardin, cela pour avoir régulièrement jeté sur son potager le noyau de la pêche de son goûter, après un bêchage d'automne, celles qui se retrouvent dans des circonstances favorables germent au printemps.
Semer avant l'hiver est intéressant pour certaines plantes, pour d'autres elle présente un certain nombre d'inconvénients, la concurrence des adventices oblige de fournir beaucoup de soins au semis surtout lorsqu'il s'agit de plantes germant capricieusement (certaines graines ne germent pas la première année) ou se développant lentement après la germination. Les jardins abritent aussi des animaux qui peuvent utiliser ces graines pour leur repas.
Des méthodes plus sophistiquées ont été inventées pour pallier ces problèmes.

Stratification.

C'est une méthode courante de vernalisation.
Elle consiste à placer dans une caisse des couches alternées de sable grossier humide et de graines qui ne doivent pas se troucher, enfouir cette caisse au pied du mur nord de la maison ou la mettre au réfrigérateur, surveiller régulièrement et semer les graines au début du printemps ou quand elles commencent à germer.
Certaines graines demandent des traitements préalables comme un trempage dans de l'eau plus ou moins chaude pendant un certain temps ou une scarification du tégument enveloppant la graine.

Cette méthode convient pour un certain nombre de plantes, comme les érables, les noisetiers, les rosacées à noyau.
Elle est adaptée au graines assez grosses (au moins la taille d'un pépin de pomme), Dans le cas de grosses graines, elle peut se simplifier en mélangeant sable et graines dans un sac en plastique que l'on garde au réfrigérateur de quelques semaines à quelques mois.

La stratification présente quelques inconvénients, les graines ne se développent pas toujours à la même vitesse selon la strate dans laquelle elles se trouvent, dans le cas de petites graines comme celles des rosiers, il peut être assez long et malaisé de les répartir uniformément en strates elles peuvent se confondre avec les grains de sable et les semer peut être très long et très fastidieux.

La pratique.

La méthode présentée est adaptée aux graines de petite taille (graines de rosiers, pépins de fruits) de plantes de régions tempérées, elle a été testée avec succès sur des graines de rosiers et des pépins de pomme, elle ne demande pas de matériel sophistiqué et est destinée à des jardiniers amateurs bien qu'avec un matériel adapté le principe devrait pouvoir être utilisé par des professionnels.

Elle se base sur un essai de reproduction "en chambre" des conditions naturelles, le principe est de semer directement les graines dans un substrat de germination auquel on fait subir les rigueurs de l'hiver, l'idée était laisser ensuite ce substrat au réfrigérateur et de lui faire passer quelque temps au congélateur de temps en temps, c'est ainsi que ça a commencé mais dès le second passage au congélateur je l'y ai oublié plus d'un mois... ce qui n'a pas sans doute pas affecté la réussite en mal, peut-être au contraire.

Seul un certain nombre de graines sont susceptibles de supporter un passage au réfrigérateur, c'est déconseillé pour les graines gardant un fort taux en eau voir : cet article sur la conservation des graines.

Le substrat de germination.

Mélange à parts égales de sable grossier (du sable de rivière tamisé devrait être idéal) et de la tourbe ou de terreau (voire un peu de compost parfaitement décomposé) tamisé. Evitez les terreaux bon marché qui contiennent des éléments mal décomposés qui même tamisés et stérilisés pourraient entrainer des problèmes, la tourbe est ce qu'il y a de plus sûr.

Le substrat doit être le plus stérile possible afin d'éviter champignons, mousses, mauvaises herbes et micro-organismes variés, si comme moi vous n'avez pas d'autoclave utilisez soit un micro-onde soit une poële.

  • - Au micro-ondes : mettez le substrat humide (mais sans excès) dans un saladier, mettez au four à puissance maximal pendant 2 minutes environ, retirer du four, mélanger pour répartir la chaleur, recommencez 2 ou 3 fois. (Cette méthode me sert aussi pour la préparation de la semoule du couscous).
  • - Dans une grande poële : mettre le substrat dans la poële, chauffer en remuant jusqu'à ce qu'il soit resté brûlant quelques minutes.

A partir de ce moment, il faudra éviter de toucher ce substrat avec des mains ou des instruments qui ne soient pas soigneusement propres.

Le bac de germination.

Une boite destinée à mettre des aliments au congélateur fera l'affaire, choisir une boite de bonne qualité aux parois fermes et au couvercle fermant hermétiquement, il est préférable qu'elle ne soit pas très haute mais un minimum de 2 cm est nécessaire, sa surface dépend des besoins, si vous semez des arbres, une boite de 10x20 cm vous permettra déjà de réaliser un joli bosquet.
Choisir si possible une boite opaque à l'exception du couvercle.

Le semis.

Il vous faut des graines bien mûres, bien nettoyées que vous aurez laissé sécher à l'air libre au moins quelques jours. Une bonne époque peut être de novembre à janvier, voire avant ou après selon la durée requise.
Placer un bon cm de substrat de germination (vous l'aurez laissé refroidir après l'avoir stérilisé !) dans le bac. Le substrat doit être humide mais pas complètement détrempé, s'il est trop mouillé laissez-le s'évaporer après l'avoir chauffé.

Disposer les graines sur la surface du substrat, elles ne doivent pas se toucher pour éviter de propager d'éventuelles attaques par des champignons ou des maladies, 1/2 cm en tous sens ou même moins devrait suffire pour beaucoup de types de graines. Il est possible de semer en ligne pour différencier des lignes de variétés (voire d'espèces) différentes placées dans un même bac. Les graines seront ensuite juste recouvertes de substrat, quelques mm au maximum.

Pour un certain nombre de cas, il est bon de faire tremper les graines préalablement dans de l'eau tiède. Dans le doute, je ne pense pas qu'il puisse être mauvais de les laisser tremper 24 heures dans de l'eau que vous aurez versée à une température supportable au toucher

L'attente.

Une fois les graines semées, refermez le bac et placez-le au frigo, la température optimale peut varier suivant les graines, mais +3 à +5° C est souvent indiqué et +5 ° C semble être un maximal. Les graines devront être surveillées régulièrement pour détecter une apparition de champignons, si cela se produit la seule solution me semble l'application d'un fongicide. Je touche du bois, je n'ai pas eu ce problème.

Je n'ai pas fait d'études comparatives pour savoir si le fait de placer de temps en temps le bac au congélateur a un impact positif sur la germination, je sais qu'en le faisant sur des rosiers, ils ont germé à 100% au printemps (pourcentage estimé en fonction de la densité des graines ayant germées, je n'avais pas compté les graines semées). Cette mise au congélateur a au moins l'avantage de vous éviter une surveillance et de vous permettre de vous absenter quelques semaines. Le gel et le dégel de l'humidité ambiante peut avoir aussi un effet mécanique sur le tégument de la plante. Attention cependant, certaines graines ne supportent pas la congélation, se renseigner sur l'habitat d'origine des plantes peut aider à déterminer celles qui la supportent vraisemblablement.

L'attente doit être plus ou moins longue suivant les graines, il est simplement préférable qu'elles germent au début du printemps pour que les plants soient prêts à affronter l'hiver suivant, il faut donc prévoir de commencer le semi au bon moment.

La germination.

Le début du printemps quand vous commencez à ressentir la nature qui s'éveille est probablement le meilleur moment de mettre le bac à germer. Le mieux est d'avoir une serre froide, à défaut une véranda, une pièce lumineuse non chauffée, voire un aquarium ou un bac transparent retourné sur la terre du jardin, cet endroit sera appelé ici serre froide, le principal est d'arriver à reproduire la température extèrieure en évitant les gelées et la chaleur excessive. Placer le bac ouvert en serre froide. L'important est de maintenir l'humidité du substrat en évitant tout excès, un coup de vaporisateur par jour devrait suffire.

Il faut surveiller au moins quotidiennement le bac et si tout se passe bien les graines devraient germer. Il y a deux possibilités à ce moment :

  • si les graines sont manipulables, pépins par exemple, on peut les replanter chacune dans un pot dès qu'elles s'ouvrent ou laissent apparaitre une racine, les placer dans un pot dans la même position en les recouvrant à peine. Si vous utilisez cette technique, le graines auront pu être placées assez proches dans le substrat de germination.
  • si les graines sont plus petites ou vos doigts trop gros, vous pouvez attendre que les plantules aient quelques vraies feuilles pour les replanter avec le maximum de racines et de substrat de germination. Dans ce cas, il fallait avoir prévu au semis un certain espace entre les graines, disons un bon demi cm.

Dans les 2 cas, les pots de transplantation devront être adaptés, des godets de petite taille en plastique devraient faire l'affaire, mettez-les dans un endroit lumineux, rapidement à l'extérieur en évitant tout risque de gel et d'ensoleillement excessif (rare en début de printemps), rentrer les pots en cas de trop grande froidure, de grosses averses, de vent, de grêle etc. qui pourraient endommager les jeunes plantules.

Le substrat de rempotage devra être adapté à la plante, généralement une bonne partie de terreau, un peu de sable grossier et un petit peu de terre franche, le tout bien homogénéisé. Attendre de bons signes de reprise avant de mettre éventuellement un petit peu d'engrais et rempoter avant que la plante ne soit trop à l'étroit.

Et voilà !

En complément.

Liens externes.

 


Rémi Fasollasi

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